En France, on dénombre 800 000 cas d’artériopathie oblitérante des membres inférieurs (AOMI), qui sont la cause de 5 000 amputations annuelles
Qu’est-ce que l’artériopathie oblitérante ?
Lorsque l’athérosclérose touche les artères de la jambe, on parle d’artérite des membres inférieurs (AMI) ou encore d’artériopathie oblitérante des membres inférieurs (AOMI).
Les membres inférieurs reçoivent le sang du cœur par l’intermédiaire des artères :
l’aorte, les artères iliaques, fémorales, tibiales et pédieuses.
Quand ces artères se rétrécissent (on parle de sténose) ou se bouchent (on parle d’occlusion) à cause de la formation de plaques d’athérome (dépôt de cholestérol), on parle d’artérite. L’AOMI est favorisée par l’ensemble des facteurs de risque de l’athérome dont le tabac, le diabète, l’excès de cholestérol, l’hypertension artérielle, la sédentarité, l’obésité abdominale, une alimentation déséquilibrée et des troubles psycho-sociaux.
Risques et conséquences de l’AOMI
Si elle n’est pas enrayée par un traitement strictement observé et des mesures d’hygiène de vie rigoureusement suivies, cette maladie grave mène à des situations invalidantes pouvant aller jusqu’à l’amputation, et réduit considérablement l’espérance de vie.
C’est aussi un signal d’alarme qui révèle un risque cardio-vasculaire élevé et qui doit conduire à une appréciation de l’état général de la personne atteinte, avec recherche systématique de lésions dues à l’athérosclérose dans l’ensemble du territoire artériel : maladie coronaire, atteinte des artères du cerveau, atteinte de l’aorte et/ou des artères du rein. C’est encore une maladie fréquente, qui touche 5% des moins de 60 ans, 20%
au-delà de 65-70 ans.
Enfin, constat implacable, le premier facteur de risque de l’AOMI est le tabagisme chronique : 90% des personnes atteintes d’artériopathie sont fumeuses.
L’évolution en quatre stades de l’artériopathie oblitérante des membres inférieurs
L’artériopathie oblitérante des membres inférieurs est une des expressions de l’athérosclérose, caractérisée par le développement sur la paroi interne des artères
(ici, celles des jambes) de plaques d’athérome, plaques de nature lipidique (dépôt de cholestérol). Ce développement obstrue progressivement le passage du sang et l’apport d’oxygène aux tissus, d’où le terme d’oblitérante pour la qualifier.
L’AOMI est définie par la mesure d’un indice, l’index de pression systolique (IPS) : il s’agit de prendre la pression artérielle systolique au niveau des poignets ou des bras et au niveau des chevilles, on fait le rapport entre la pression artérielle systolique de la cheville droite sur la pression artérielle systolique du bras droit puis le même rapport pour le côté gauche; quand ce rapport est inférieur à 0,9 à droite et/ou à gauche, on estime qu’il y a AOMI.
Cette définition très précise, de type hémodynamique, a le mérite de repérer une personne atteinte d’artériopathie même lorsqu’elle ne ressent encore aucun symptôme, c’est ce qu’on appelle le stade infraclinique.
Stade 1 : infraclinique
Au début, la personne atteinte ne ressent aucun signe particulier malgré la présence de plaques d’athérome : c’est le premier stade.
Il s’agit là déjà d’une artériopathie déclarée, mesurable par l’index de pression systolique (IPS), à prendre immédiatement en charge par un traitement médical et des mesures de lutte contre les facteurs de risque cardio-vasculaire modifiables : arrêt du tabac, traitement d’une dyslipidémie, d’une hypertension artérielle et/ou d’un diabète, alimentation équilibrée (moins de gras, de sucre et de sel, plus de fruits et légumes et de poissons), activité physique régulière avec en priorité la marche (dans l’idéal une heure par jour), lutte contre la graisse abdominale et les troubles psycho-sociaux (stress et dépression).
Stade 2 : claudication intermittente
Avec le développement de la maladie, apparaissent bientôt les premières douleurs à la marche et la claudication intermittente. La douleur, sorte de crampe localisée notamment au niveau du mollet (quand il y a atteinte des artères situées au niveau du fémur et de la face postérieure du genou), est suffisamment intense pour obliger la personne à s’arrêter.
La douleur disparaît alors assez rapidement (en deux ou trois minutes) mais peut réapparaître à la marche. La distance parcourue par le patient jusqu’à ce qu’il soit obliger de s’arrêter du fait de la douleur est appelée périmètre de marche ; c’est un élément fondamental pour évaluer le degré de sévérité de la maladie et son suivi.
En effet le traitement, la lutte contre les facteurs de risque, et les changements de comportement en terme d’hygiène de vie vont avoir un impact majeur sur ce périmètre
de marche qui va augmenter, signe de l’amélioration clinique.
Cette douleur qui se déclare au bout de 100, 200 ou 300 mètres, varie en intensité en fonction de la vitesse de la marche, de la pente du terrain, de la température extérieure
et de l’importance des lésions athéromateuses. La claudication intermittente peut aussi s’accompagner de douleurs fessières ou de la hanche, quand par exemple l’artère iliaque (au niveau du bassin) est touchée par l’athérosclérose.
Cependant, la gêne occasionnée par cette claudication peut être ressentie différemment selon que la personne qui en est atteinte est active ou sédentaire, d’où la nécessité pour le médecin de faire préciser ce paramètre à son patient.
Stade 3 : douleurs de repos
Plus tard, si rien n’est fait pour enrayer l’évolution, les douleurs apparaissent même au repos et notamment en position couchée, particulièrement la nuit au lit. La seule façon d’atténuer la douleur, mais efficace seulement pour quelques jours : placer ses jambes pendantes en dehors du lit ou bien passer la nuit dans un fauteuil. Il s’agit là d’un stade ischémique sévère, qui nécessite une prise en charge rapide.
Stade 4 : troubles trophiques, ulcérations et gangrènes.
Le stade ultime se manifeste par l’apparition de troubles trophiques (perturbant la nutrition des tissus) avec processus de dégénérescence aboutissant à la destruction des tissus :
soit sous la forme d’ulcères artériels au niveau du tiers inférieur de la jambe, du pied ou des orteils, soit sous la forme de gangrène (mort des tissus suite à l’arrêt de l’irrigation sanguine), exposant le membre atteint à une menace importante d’amputation.
Ischémie aiguë d’un membre
Elle est caractérisée par la souffrance d’un membre ou de son extrémité par manque brutal d’apport sanguin. Il s’agit d’une douleur brutale, avec refroidissement et pâleur du membre et parfois même trouble de sa motricité (impotence) et de sa sensibilité.
C’est une urgence vasculaire avec nécessité d’une désobstruction de l’artère car la thrombose (l’obstruction) intravasculaire est le plus souvent la cause de cette occlusion au niveau d’une plaque athéromateuse.
Le traitement doit être commencé le plus tôt possible, il faut appeler le 15, le SAMU au plus vite. Cet accident expose au risque de mort subite ou de laisser des séquelles importantes.
Un bilan vasculaire complet
Si l’AOMI représente un risque de complications sévères, voire de décès précoce, de la même façon, les autres atteintes vasculaires, au niveau coronarien ou cérébral, sont une menace à prendre en compte. L’athérosclérose étant une maladie diffuse, il est indispensable de faire un bilan vasculaire complet, de rechercher notamment les autres localisations de l’athérosclérose, au niveau de l’aorte, des carotides, des artères coronaires et rénales.
Pour confirmer l’AOMI, l’examen clé est l’écho doppler des artèresdes membres inférieurs. Il va préciser les artères touchées (iliaques, fémorales, tibiales, pédieuses…), le degré des lésions (plaques, sténoses, occlusion…), les circulations collatérales dites de suppléance.
Un écho doppler des troncs supra-aortiques (au niveau des carotides) et de l’aorte abdominale évaluera l’extension de la maladie artérielle.
De même, le cardiologue proposera une épreuve d’effort (ECG) et/ou une scintigraphie myocardique voire si nécessaire une coronarographie (pour dépister une maladie coronaire). Le tout complété par la prise de la pression artérielle à la recherche d’une hypertension artérielle et d’un examen biologique, sous la forme d’une prise de sang,
à la recherche d’une dyslipidémie, d’un diabète, d’une insuffisance rénale, d’un trouble de la coagulation, des globules rouges ou des plaquettes.
Prise en charge de la maladie
Elle dépend du stade de la maladie. Dans tous les cas, le traitement est celui de la maladie athéromateuse cardio-vasculaire générale et de ses facteurs de risque. Il repose sur des mesures d’hygiène de vie : arrêt impératif du tabac (première cause de l’artérite), perte de poids si nécessaire, exercice physique quotidien (supervisé ou non en centre de rééducation), alimentation équilibrée…
S’y associe un traitement par médicaments comprenant un antiagrégant plaquettaire pour fluidifier le sang afin d’éviter qu’il forme des caillots obstruant l’artère, une statine pour contrôler le cholestérol et un inhibiteur de l’enzyme de conversion (IEC) qui protège les artères des effets de l’athérome.
En cas d’échec de cette prise en charge ou quand la situation est grave (ischémie sévère ou aiguë), une revascularisation est nécessaire, soit par un médecin interventionnel (dilatation et/ou stent) et/ou par un chirurgien vasculaire (pontage).
Sources : Fédération de la cardiologie.