Il convient de dire que chaque maladie véhicule, pour ceux qui en souffrent, des peurs, des croyances négatives pesant largement sur la psychologie des malades.

 

Si nous nous arrêtons un instant sur la personnalité du diabétique, nous constatons à quel point celui ci est pris, ou se prend lui même  dans les mailles d’un filet fantasmatique qui limite son épanouissement.

 

Une peur intériorisée

Qu’est ce que cela veut dire précisément ? Découvrant sa maladie, le diabétique n’ayant pas reçu l’éducation nécessaire à vivre en harmonie avec elle, aura tendance à construire de nombreux scénarios catastrophes autour de son vécu. En résumé, sa vie émotionnelle se trouve entachée par une peur  à laquelle il ne peut faire face. Une peur irrationnelle d’être en danger lors d’un trop(hyperglycémie)ou d’un moins(hypoglycémie). Souvent en vigilance, en alerte sur le maintien de son équilibre glycémique, le diabétique développe des peurs qui portent sur d’autres aspects de sa vie, comme la sexualité, les relations sociales, l’image de soi, les émotions…etc.

Peurs intériorisées, c’est à dire cachées au fond de soi, une inquiétude au long cours, un non dit, quelque chose de négatif que le diabétique porterait en lui de manière irréversible. Peurs projetées sur les autres perçus comme des personnes désirant son naufrage (parce qu’ils sont  insouciants, ne le protègent pas de ses excès alimentaires ou provoquent sa colère trop souvent, tout cela fort dommageable pour sa santé ) peurs de la situation vécue comme un danger potentiel (se trouver isolé en pleine campagne ou en voyages, sans médicaments, à manger n’importe quoi, ou encore une soirée entre amis où l’on tarde à dîner, ou au contraire se sentir obligé de faire honneur à ses hôtes, une table trop bien garnie).Il faut voir tous ces aspects de la réalité comme autant de difficultés à affronter.

Tout comme la nuit, le réveil du diabétique semble nimbée d’une anxiété qui le plonge dans un questionnement incessant. «J’en suis ou non?, Ou en est  mon diabète, là, maintenant?» Peut-il se dire :  ma glycémie, à 2,50 ? à 0,80 ? à moins que cela ne soit 0,70 ? 0,60 ? Cela explique pourquoi le diabétique est souvent perdu dans ses pensées, à la limite de la mélancolie, car il réfléchit à son état.

En fait le diabétique est loin d’être tranquille, apaisé. Il est parfois rassuré quand il rencontre un autre diabétique. Une connivence s’établit alors immédiatement avec l’autre, car ils partagent ensemble les mêmes inquiétudes, la même veille. Il manifeste un  souci de soi, autant qu’un souci de l’autre, parce qu’il a un vécu et des attentes similaires. Le soutien et la compassion se faisant instantanément, deux diabétiques pourraient avec la plus grande facilité vivre sans nuages. Dans cette rencontre l’un apportant à l’autre la régulation, la protection, le calme, l’équilibre nutritionnel et affectif  que le diabétique cherche à trouver. J’ai eu l’occasion, au cours d’une visite chez un couple de diabétiques, la manifestation de cet idéal de vie. Ils évitaient de se mettre en colère, se parlaient doucement, entreprenaient des achats concertés, planifiaient une cuisine adaptée, contrôlaient ensemble leur glycémie à jeun comme un rituel de passage, prélude  à une merveilleuse journée. Tout sonnait juste. Chez ce couple de retraités diabétiques, la peur avait disparue.

Il faut se garder de croire que cette situation est généralisable. Nous voulions montrer que dans le cas précis d’un couple de diabétiques, chacun se sent soutenu, aidé par son conjoint. Il y a une congruence de point de vue sur la manière dont il faut vivre avec son diabète et où la peur n’a plus sa place.

 

L’importance de l’entourage

Par cet exemple, on comprend mieux l’intérêt pour le diabétique d’exorciser sa peur par un échange permanent avec son entourage familial.  Les proches doivent mesurer l’importance accordée par le diabétique à ceux qui l’écoutent. Il ne fait aucun doute que cette marque d’attention le rassure  et lui fait un grand bien psychologique. Le diabétique se sent alors compris dans sa maladie, par  l’ensemble de ses actes, sa psychologie (prélèvement sanguin quotidien, prise de médicaments, équilibre émotionnel recherché) Aidé et apaisé par la compréhension de son vécu, le diabétique aura ainsi plus de facilités à se libérer de ses peurs.

 

Norbert ZERAH – Psychologue clinicien – Paris – Praticien EMDR