Aujourd’hui en France, 15 000 à 20 000 enfants de moins de 15 ans sont atteints d’un diabète de type 11. Son incidence chez les enfants a quasiment doublé ces 20 dernières années et serait de 13,5 individus pour 100 000/an2. On estime le nombre de nouveaux cas chez les enfants à 2 700 chaque année, ce qui représente une croissance de plus de 3 % par an.

 

Cette augmentation de l’incidence du diabète s’explique par l’interaction de difféents facteurs environnementaux qui agissent sur un terrain génétique de prédisposition. Des cofacteurs alimentaires, toxiques ou encore immunitaires contribuent au déclenchement d’un phénomène d’auto-immunité qui aboutit à la destruction progressive des cellules bêta des îlots de Langerhans qui fabriquent l’insuline.

«Les facteurs environnement aux ne sont à ce jour que suspectés et non bien définis»  précise le Professeur Penfornis, endocrino-diabétologue au centre hospitalier sud francilien. Malgré des symptômes caractéristiques (polyurie, polydipsie, énurésie3, amaigrissement), le diagnostic du diabète de type 1 est souvent posé tardivement, au stade d’une complication, l’acidocétose4.

 

Ce que le diabète change au quotidien

L’annonce du diagnostic d’un diabète de type 1 est souvent brutale et stressante pour les familles. Le diabète de type 1 nécessite une auto surveillance glycémique quotidienne (idéalement 4 à 6 fois par jour) et des injections d’insuline plusieurs fois par jour. Il faut également apprendre à compter les glucides contenus dans chacun de ses repas, pour adapter la quantité d’insuline dont l’organisme a besoin: c’est ce qu’on appelle l’insulinothérapie fonctionnelle. C’est un traitement contraignant et souvent difficile à gérer notamment à l’adolescence.

 

Le besoin d’accompagner les adolescents

L’adolescence peut être une période de doutes, d’incertitudes, voire de mal-être chez des jeunes souvent en quête d’identité. Dans ce contexte, la gestion d’une maladie chronique comme le diabète complique les choses à un âge où la vie au jour le jour et l’insouciance priment. «Même si le vécu est très variable d’un ado à l’autre, il peut être difficile pour certains d’accepter les contraintes de la maladie. Contraintes qui les font se sentir différents des autres, une différence qu’ils n’ont pas choisie», relève le Pr. Penfornis. Les enjeux de la maladie et ceux de l’adolescence s’affrontent : l’adolescent a besoin d‘affirmer son autonomie pour assurer son individuation.

Le passage de l’enfance à l’âge adulte – alors que le diabète et son traitement renvoient à la dépendance, aux contraintes, aux inquiétudes des parents, etc. C’est pourquoi certains peuvent avoir tendance à se révolter contre la maladie ou à se replier sur eux-mêmes. Le diabète chamboule l’organisation de la vie des familles, c’est un apprentissage pour l’enfant et ses parents. «Il y a un nouvel équilibre à trouver mais il est important de garder en tête que c’est le diabète qui s’adapte à la vie de famille et non l’inverse» précise Audrey Dahoui, psychologue au CHU de Besançon. Pour les adultes, la difficulté est de les laisser devenir progressivement indépendants et autonomes dans la gestion de leur maladie tout en restant attentifs à leurs besoins.

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Adhésion et observance au traitement

Deux études (T1D Exchange et Teens) viennent confirmer la difficulté d’obtenir un bon équilibre glycémique dans le diabète de type 1 pour les jeunes patients. En effet, un tiers des enfants et adolescents diabétiques seulement sont équilibrés. Les raisons sont multiples : nécessité de réaliser des contrôles glycémiques répétés, difficultés à adapter les doses d’insuline en fonction des modifications alimentaires ou de l’activité physique, variabilité intra individuelle de l’insulinémie, risque d’hypoglycémie ou, chez les jeunes filles, crainte du surpoids, conduisant les diabétiques à réduire les doses d’insuline. Il n’est donc pas rare de voir une diminution de l’observance de ces jeunes patients pendant l’adolescence.

Traversé par des phases de rejet ou de révolte contre sa maladie, l’adolescent diabétique peut ainsi être amené à se mettre en danger. Pourtant, ne pas suivre son traitement peut aboutir à des complications graves pouvant aller jusqu’au coma. Il est donc difficile pour un adolescent qui vit au jour le jour d’anticiper et de se mettre dans une configuration de prévention.

«L’adolescent doit s’approprier son corps et sa maladie. Il s’agit d’un processus d’acceptation du fait de se soigner seul. Comme beaucoup d’adolescents, les jeunes diabétiques peuvent être insouciants et se mettre en danger plus ou moins volontairement pour rechercher les limites de la maladie» ajoute Audrey Dahoui.

D’un point de vue médical, l’adolescence s’accompagne aussi de changements hormonaux qui rendent le diabète difficile à équilibrer. En effet, l’adolescence est caractérisée par une augmentation des besoins en insuline dû à une moindre sensibilité à celle-ci lors de la puberté, mais, selon le Professeur Penfornis, la principale raison du mauvais équilibre chez les adolescents est la difficulté de vivre avec un diabète. «Le diabète de type 1 est une maladie contraignante en soi et elle l’est encore plus lorsqu’on est jeune. Les raisons sont plus dans la difficulté de la gestion quotidienne d’un adolescent que dans des questions physiques et hormonales» précise-t-il.

Pour se sentir plus libres et éviter les injections à répétition, de plus en plus d’adolescents optent pour la pompe à insuline. «C’est un outil qui facilite la prise en charge pour les jeunes qui acceptent et s’impliquent dans leur diabète, explique le Pr. Penfornis. En revanche, pour une partie des ados qui vivent mal leur diabète, ce n’est pas la solution car la pompe leur rappelle en permanence cette maladie qu’ils veulent oublier».

Sources : Roche Diabete Care

NOTES ET VOCABULAIRE :

1 Surveillance épidémiologique du diabète de l’enfant • INVS (2007).

2  Diabète de type 1 (DID) – Inserm (Avril 2014).

3 Polyurie : augmentation (au-dessus du seuil de 3 litres) de la quantité des urines émises pendant 24 h.

• Polydipsie : besoin exagéré de boire.
•  Enurésie : émission d’urine involontaire et inconsciente

4 Accumulation dans le sang de substances acides en raison de la dégradation des graisses et incapacité à utiliser le sucre, pouvant entrainer des complications graves et mettre le pronostic vital en jeu chez les personnes diabétiques (coma diabétique).

 

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« La maladie n’est pas un choix, j’ai choisi de lui faire une place et j’apprends à vivre avec de façon positive »

«Le diabète est une maladie invisible, c’est un avantage comme un inconvénient.
On se dit souvent
«je suis plus fort que la maladie» mais physiquement à certains moments, elle prend le dessus et nous rappelle à l’ordre.»

déclare Ludivine Cueille, 35 ans,  atteinte d’un diabète de type 1 depuis l’âge de 10 ans.

 

Pour Ludivine Cueille, atteinte  d’un diabète de type 1 «L’adolescence n’est pas une période facile, le corps se modifie visuellement et on ne se sent pas bien, j’en voulais à mon diabète. Aujourd’hui si je devais donner un conseil c’est rester soi-même, ne pas hésiter à parler de sa maladie autour de soi et surtout ne pas avoir honte d’être malade.»